Qu'est-ce que le décrochage?

Publié le par Juliette

Aérodynamique
phénomènes remarquables

 
 
 
    Qu'est-ce que le décrochage ?


 On parle par habitude du décrochage d'un avion mais en réalité, le phénomène qui nous intéresse est le décrochage de l'aile. Les filets d'air circulant autour d'une aile en épousent à peu près la forme. Toutefois, si on sollicite trop cette aile en lui demandant plus qu'elle ne peut d'un point de vue aérodynamique l'écoulement de l'air autour du profil va se décoller de l'aile dans sa partie supérieure. Du coup le rendement de l'aile va s'écrouler, sa portance va diminuer brutalement. On dit alors que l'aile a décroché. Lorsque ce phénomène se produit sur un avion en vol, la perte de portance est telle que l'aile n'assurant plus sa fonction sustentatrice, l'avion "tombe" ou du moins continue sur sa trajectoire par inertie mais le poids, qui n'est plus compensé par rien finit par l'emporter! Le cas le plus classique utilisé à titre de démonstration lors de l'apprentissage du pilotage consiste à ralentir l'avion en palier jusqu'à arriver au décrochage de l'aile. L'avion généralement pique du nez, s'enfonce, il ne reste plus au pilote qu'à accompagner ce "piqué" le temps de reprendre suffisamment de vitesse pour que l'avion puisse être remis en vol horizontal. Cet exercice ne présente aucun danger s'il est réalisé à une altitude suffisante.

Beaucoup de pilotes débutants, pensent à tort que le phénomène du décrochage est conditionné uniquement par la vitesse. C'est une erreur importante. Le décrochage n'est conditionné que par l'incidence, c'est à dire l'angle avec lequel l'air "attaque" l'aile. Cette incidence varie, elle, simultanément en fonction de la vitesse et du facteur de charge auquel est soumis l'avion. Pour faire apparaître le phénomène de décrochage, il suffit d'amener cette incidence à la valeur maximale supportable pour le profil (environ 17° sur un profil standard). Cette incidence peut être obtenue à toutes les vitesses du domaine de vol ou presque en faisant varier le facteur de charge. Lorsque l'on définit une vitesse de décrochage, celle-ci s'entend, sauf spécification, sous un facteur de charge de 1g.

La vitesse de décrochage évolue selon la racine carrée du facteur de charge. En d'autres termes, un DR400-108 qui décroche à 100 km/h sous 1g, décrochera vers 200 km/h c'est-à-dire à sa vitesse de croisière s'il est soumis à un facteur de charge de 4g. Comment obtenir 4g? C'est simple, on peut faire un virage serré à 75° d'inclinaison ou faire une bonne ressource après un piqué. Bref, on a là les trop classiques "virage serré au dessus de la maison des amis en radada" ou encore "le piqué et le passage genre Papy Boyington au dessus de la maison des parents de la copine" qui, malheureusement tuent tout les ans quelques pilotes de par le monde. Cette méconnaissance des effets du facteur de charge est donc à l'origine de nombreux accidents lors de vols effectués en évolutions serrées à basse altitude.

 
    Qu'est-ce que la vrille (autorotation)?


Mon père me disait avoir vu dans un hangar, lorsqu'il était adolescent, cet écriteau:
"la perte de vitesse c'est la vrille, la vrille c'est la mort".

Ceci témoigne du côté quasiment mythique et de la crainte qu'inspirait ce phénomène. La vrille est un décrochage dissymétrique entretenu. On l'obtient en amenant l'avion au décrochage et en le plaçant en vol dissymétrique. Lorsqu'un avion est installé en vrille, une de ses ailes est décrochée, l'autre non. L'avion tournoie sur lui-même avec le nez bas décrivant une spirale très serrée en descente verticale lorsque le phénomène est établi. Pour sortir de vrille, il faut faire cesser la dissymétrie en utilisant le plein débattement de la gouverne de direction puis, presque simultanément, "rendre la main" (pousser sur le manche) afin de réduire l'incidence de l'aile pour empêcher cette dernière d'atteindre ou de rester à ou au-delà de l'incidence de décrochage. On veillera à acquérir suffisamment de vitesse ensuite afin de pouvoir appliquer le facteur de charge nécessaire pour redresser l'avion sans se retrouver à nouveau à l'incidence de décrochage.

De nos jours la vrille est mieux connue et les avions mieux conçus. Les techniques de pilotage ont elles aussi évoluées et la vrille ne présente plus le danger d'autrefois à condition de la contrer rapidement, certains appareils étant plus ou moins long à sortir de vrille si elle est bien installée. Elle est aujourd'hui une figure de voltige parfaitement maîtrisée par les pratiquants de cette discipline. Il n'y a plus de raison de la craindre, mais, comme tout phénomène "décroché", l'autorotation entraîne une importante perte d'altitude et nécessite donc d'être raisonnablement haut pour prétendre y faire face efficacement.

 
  Qu'est-ce qu'un virage engagé?


Le virage engagé ressemble un peu à l'autorotation ou à la vrille en ce sens que l'avion décrit une spirale descendante très serrée. Ces deux phénomènes sont pourtant radicalement différents. En effet, lors d'une vrille on observe un décrochage d'une aile et une dissymétrie, tandis que lors d'un virage engagé, l'avion vole parfaitement normalement à ceci près qu'il est en virage très serré avec une très forte attitude à piquer.

Si, comme le veut le (mauvais) réflexe naturel du pilote, il tire sur le manche pour tenter de faire cesser la descente et de redresser le nez de l'avion, celui-ci poursuit sa trajectoire en la serrant davantage. La vitesse augmente rapidement et tout effort à cabrer sur les commandes ne fait qu'empirer la situation. L'avion se retrouve soumis à de très forts facteurs de charge mais décroche rarement tant sa vitesse est importante. Par contre, au-delà d'un certain seuil, ce facteur de charge n'est plus supportable par les structures de l'avion qui cèdent, entraînant généralement la rupture de l'aile, ce qui conduit bien évidemment au crash.

La sortie de virage engagé, pour peu qu'on l'ait diagnostiqué correctement est très simple et totalement efficace. L'avion étant en virage, il suffit d'annuler son inclinaison en utilisant les ailerons puis, une fois l'inclinaison annulée, redresser la trajectoire à piquer. Le danger restant correspond à la vitesse excessive acquise et qui nécessite la plus grande douceur aux commandes pour éviter d'endommager la cellule de l'avion. On veillera à réduire les gaz vers plein ralenti simultanément afin de ne pas aggraver la situation de survitesse déjà présente.

Le virage engagé est un piège subtil et pernicieux pour les pilotes volant aux instruments sans visibilité extérieure. L'analyse du phénomène à partir des indications des simples instruments n'est pas toujours aisée et la récupération demande sang-froid et rigueur dans la procédure de sortie qu'il faut mener dans le bon ordre et totalement même si l'envie de tirer encore et toujours sur le manche est envahissante dans ce genre de situation. Dans le cas du vol aux instruments, la meilleure prévention est la concentration sur l'horizon artificiel afin d'éviter de laisser l'avion se mettre seul dans cette posture fort impressionnante et pour le moins inconfortable.

 
    Stabilité/instabilité

La stabilité est une notion de physique qui dit que lorsqu'un système en équilibre est soumis à une perturbation qui l'éloigne de sa position d'équilibre, il y revient tout seul. A l'inverse un système instable éloigné de sa position d'équilibre s'en éloignera davantage. Par exemple: un fil à plomb est en équilibre stable car si on bouge le plomb, celui-ci oscillera et reviendra à sa position initiale. A l'inverse, un balai en équilibre à l'envers sur le bout d'un doigt est en équilibre instable. Si on le pousse un peu (et que la main qui le tient reste immobile), il tombe en s'éloignant de sa position initiale.

Pour un avion, on peut définir un équilibre aérodynamique stable ou instable. Un avion stable qui subit une rafale faisant augmenter sa portance de façon transitoire, "répondra" en créant un couple piqueur qui s'opposera à cet accroissement de portance et l'avion reviendra à sa position d'équilibre. Si l'avion est instable, la même rafale, propre à augmenter la portance, créera un couple cabreur venant accentuer le phénomène, ce qui créera un nouveau couple cabreur supplémentaire etc... Le phénomène est divergent et donc instable.

En pratique à part quelques prototypes, il existe peu d'avions instables. Ceux-ci ne sont pilotables qu'au travers de calculateurs tant la réponse à une perturbation ou à une sollicitation aérodynamique quelconque doit être rapide et parfaitement quantifiée tant en sens qu'en valeur absolue. On peut concevoir des avions à l'équilibre indifférent, c'est à dire ni stables, ni instables. Là encore la conduite de tels avions nécessite l'utilisation de calculateurs affectés aux commandes de vol. L'intérêt de ce genre d'avion tient au fait qu'ils sont beaucoup plus maniables et économes encore que cette dernière particularité n'est pas actuellement un argument sensible. La recherche dans le domaine du vol instable est aujourd'hui réservée plutôt au domaine militaire et à l'étude de la manœuvrabilité.

 
    Qu'est-ce que le lacet inverse ?


Le lacet inverse est un phénomène qui fait pivoter l'avion sur son axe de lacet lorsqu'on l'incline et ce, dans le sens opposé à l'inclinaison commandée. Le lacet inverse n'existe que durant le temps où la commande de roulis est actionnée.

L'aileron levé génère moins de traînée que l'aileron baissé. Sur le schéma, on représente le phénomène en remarquant que l'aileron baissé oppose une plus grande surface à l'avancement. Cette différence de traînée crée un couple qui fait pivoter l'avion autour de son axe de lacet.

Ce phénomène est d'autant plus marqué que la déflexion des commandes est importante et que l'aileron est placé loin du centre de gravité. Il sera donc important sur les machines de grande envergure évoluant à basse vitesse c'est à dire les planeurs. Sur ce type de machine le lacet inverse est tel, qu'il faut utiliser la déflexion maximale du palonnier pour le contrer à quasiment chaque mise en virage (à basse vitesse). On peut facilement faire tourner ainsi le planeur de 30° ou plus à droite en l'inclinant à gauche. Les rares étourdis ayant décollé avec une éclisse sur la direction peuvent témoigner de l'extrême délicatesse qu'il y a à piloter un planeur sans moyen de contrer le lacet inverse!

Afin de limiter cet effet secondaire, la cinématique des tringleries de commandes d'ailerons est conçue de telle sorte que l'aileron qui se baisse, se baisse moins proportionnellement que ne se lève l'autre aileron, ceci afin de limiter la traînée différentielle.

 
    Qu'est-ce que le lacet et le roulis induit ?


 Le lacet et le roulis induit, même s'ils concernent chacun un axe différent, ont tous deux la même cause. En virage, l'aile extérieure est plus loin du centre du virage que l'aile intérieure. En conséquence de quoi, l'aile extérieure (haute) parcourt une plus grande distance que l'aile intérieure. Or, les deux ailes mettent le même temps à parcourir un tour complet donc si elles parcourent des distances différentes dans le même temps, c'est qu'elles n'ont pas la même vitesse. L'aile haute avance plus vite que l'aile basse. On observe un phénomène semblable sur les voitures où, en virage, la roue extérieure tourne plus vite, ceci imposant la présence d'un différentiel.

Donc, nos deux ailes n'avancent pas à la même vitesse.

 

  • L'aile la plus rapide génère plus de portance et plus de traînée que l'autre. L'aile haute "porte" plus, elle à tendance à se lever davantage: L'avion s'incline de lui-même de plus en plus, il s'agit du roulis induit.
  • L'aile la plus rapide traîne plus et est retenue en arrière: le nez de l'avion tend à être "retenu" à l'inverse du virage c'est le lacet induit.

 

Pour contrer ces deux phénomènes, en virage stabilisé, le pilote "mettra" en permanence un peu d'aileron à l'extérieur pour éviter la tendance de l'inclinaison à augmenter. (Ceci est une des causes de la mise en virage engagé par distraction en vol aux instruments). Cette petite déflexion générera un lacet inverse qui compensera en partie le lacet induit, sinon, le pilote appliquera légèrement les palonniers dans le sens du virage pour compenser le lacet induit.

Tous ces phénomènes ne sont que très peu voire pas du tout sensibles sur avion (de tourisme ou non vu la faible envergure et donc le petit bras de levier), par contre en planeur, ils sont très présent ce qui fait du vol à voile une école de pilotage incomparablement plus formatrice car elle nécessite un pilotage très fin et relativement complexe. J'ai retrouvé une complexité comparable en hélicoptère où les effets secondaires sont assez délicats à maîtriser au début en vol stationnaire, particulièrement sur les hélicos à piston.

 

Publié dans mécanique

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